La route impossible 124 km dont 2’000 m de dénivelé, les 15 derniers km en camion et une descente de nouveau dans la boue sur 30km
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Goderdzi, 21 juillet 2022
Nous nous réveillons dans un refuge à 2’000 mètres d’altitude, posé sur un alpage parsemé de chalets et granges, c’est la station alpine de Goderdzi, 124 km de Batoumi, visibilité 30 mètres, environ 10 degrés.
Comment en sommes- nous arrivés là?
Petit retour en arrière. après l’objectif majeur de visiter le jardin botanique de Batoumi, nous avons le projet de rallier Tbilissi par l’axe Sud, longeant la frontière turque pour partie, et traversant le parc national de Mtirala. A la fin du premier tiers du parcours, il y a le « Goderdzi Alpin Garden » ouvert en 2021! Départ le mardi 19 juillet 2022, traversée embouteillée de Batoumi sur 15 km et nous nous enfonçons dans la vallée de la Tchorokhi, veille connaissance. (Nous l’avions descendue sur 120 km d’ouvrages hydrauliques côté turque jusqu’au barrage d’Arpvin.
Nous contournons les immenses flaques d’eau boueuses issue des orages récents et dont la profondeur dépasse toujours nos espérances les plus optimistes et montons gentiment une vallée resserrée, sans horizon, plafond de nuages à 300 mètres. Le soir arrivant, arrêt à Keda, dans un petit hôtel sans charme, mais confortable. Une nuit de pluies intenses plus tard, nous reprenons la route, qui commence à monter sacrément , mais surtout dont des tronçons de plus en plus importants comportent une partie superficielle (l’asphalte) méticuleusement oubliée. Plus nous avançons, plus la piste devient chaotique. Nous reprenons espoir après un repas de midi délicieux (Borch) dans le village de Khulo où des marchands de tabac en vrac étalent leur magnifiques récoltes, les plants de tabac ici font 2 mètres de haut.
A la sortie de Khulo, tout se gâte, plus de route, que de la terre encore quasi sèche, qui va se transformer en boue de 5 à 25 cm d’épaisseur. 3 heures de montées avec des effondrements de part et d’autres et des pelleteuses qui dégagent, des camions qui évacuent, des camionnettes, des gens qui voyagent dans ce chaos.
Le chaos d’un chantier inquiétant
Au fil du parcours cela devient pénible, alors que le paysage est grandiose, gorges, villages en bois, cultures étagées, nous comprenons que nous sommes au milieu d’un drame national. Le gouvernement géorgien a confié la reconstruction de la route principale Sud, Batoumi-Tbilissi, à une entreprise chinoise.
Et les choses ne se passent pas comme prévu. Curieusement, la surface asphaltée à été retirée sur 40-60 km, des ouvrages d’art soutènement des remblais avec des gabions (Caissons en grillages contenant des pierres) , passage de torrent. Tout est en cours de construction, rien n’est fini et ceci de 200 à 2’000 mètres d’altitude. Une météo super pluvieuse rend le chantier désespérant. Au vu des éboulements, nous décidons de dégager de la zone au plus vite, soit par le col de Goderhzi.
Une fin des travaux hypothétique
Rencontrés au hasard d’un virage , un ingénieur chinois chef du projet et son traducteur géorgien, semble hors de ses baskets. Les villageois sont résignés, les travaux durent depuis 2 ans et vont s’achever pour 2022, repoussés à 2024-26. Techniquement, ce que nous voyons est totalement déplorable. Aucun drainage, ni de surface, ni de profondeur. Gabions posés en surface à même la terre. Glissements de terrain en permanence, la forêt part avec à chaque pluie. Pas d’approche par lot, tout est entrepris sur toute la longueur de la route, y compris en traversée de village qui sont des champs de boue et sur les 25 km de descente côté Tbilissi, soit 100 km de chantier dantesque digne d’une traversée de mines à ciel ouvert, dans des conditions de sécurité déplorables pour les ouvriers et les voyageurs, chauffeurs, etc…
Nous n’avons pas écouté les conseils d’un baroudeur autrichien qui descendait avec son 4X4
Un convoi de baroudeurs 4×4 de type Paris Dakar, croisé , eux en descente, nous a bien parlé de boue impossible à surmonter , mais nous ne l’avons pas imaginé, car à ce moment là, le sol était sec. et puis , depuis 6 mois, nous rencontrons tous les jours des gens qui nous disent que faire du vélo est impossible (chaud, froid, altitudes..). Vers 1200m, nous surmontons plusieurs passages boueux et pensons être sortis d’affaires. Cécile éclate son pneu arrière sur une pierre cachée sous la boue. Heureusement, réparation à proximité d’une fontaine qui nous permet de voir rapidement le problème. Nous repartons et constatons qu’il nous a fallu 1 heure pour monter de 100 m et qu’il pleut.
Nous abandonnons à 1300 m d’altitude, 15 km de l’objectif final. Gentiment des villageois négocient pour nous notre évacuation par un camion léger. Nous aurons juste le temps de nettoyer nos vélos et matériels méconnaissables sous la boue.
Une station de ski en devenir
19h30, en pleine nuit, brouillard mouillé, 5-10 degrés, 2’000 m d’altitude avec un petit vent, nos sommes débarqués dans ce que nous croyons être « le Verbier local ». Toujours optimistes. On nous indique une route dans le bouillard où nous trouverons un refuge avec une chambre sèche et des draps, une douche, le luxe. Rien à manger, il faudrait repartir sous la pluie….. On tape dans les réserves de fruits secs.
Le lendemain sera consacré au jardin botanique perché au col, et à la redescente dans une piste tout aussi impraticable.
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