Verdures à Tbilissi

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Tbilissi, 28 juillet 2022

Depuis la ville de Gori, nous longeons la rivière Koura qui s’est fortement éloignée de notre parcours puis fortement rapprochée aux environs Nord de la ville de Tbilissi. Une joyeuse « bourgade » de 1.5 million d’habitants sur 3.7 millions que compte la Géorgie, pays deux fois plus grand que la Suisse, mais 4 fois moins peuplé (54 hab/m2 contre 202 hab/m2 en Suisse).

En quelques secondes nous passons des plateaux arides aux berges et gorges de la rivière, submergée de forêts de peupliers, acacias, robiniers, chênes, érables, noyers, pins et fruitiers sauvages comme les pruniers, pommiers.

Nous passons également d’une route à 2 voies à une voie rapide à 8 voies, la voie de droite servant de haltes de bus, piste cyclable et toutes activités de transbordements possibles et inimaginables sur une autoroute helvétique interdite aux cyclistes. Ici, tout est permis et on se dit que l’on entre dans l’enfer urbain de type « Manhattan ou Dubaï »!

Les arbres rois

Tbilissi, comme toute la zone des Balkans (Turquie exceptée- nous n’y avons pas passé assez de temps pour le dire) est construite et se développe avec les arbres. Pas une rue, fut-ce-t-elle étroite, sans arbre.

Toutes les avenues de 4 à 6 voies de circulations sont totalement couvertes de platanes culminants entre 20 et 30 mètres de haut. ici le soleil cogne très fort, les températures passent en 1 heure de 20 à plus de 30 degrés, la vie serait totalement intenable sans ses cathédrales de verdure qui ne laisse plus passer le soleil et tamise la lumière. Le platane règne en maître dans les grandes rues, il est remplacé par les cyprès, robiniers, faux camphriers, cèdres, noyers dans les rues plus étroites. les individus ne sont pas taillés, ils sont laissés à leur développement et colonisent tout le volume disponible, sans que cela ne gêne ni les autorités (soucieuses comme en Suisse de la sécurité des piétons), ni les passants, ni les habitants des immeubles de 2-3 étages pour les parties anciennes et 15-30-40 étages pour les immeubles modernes. Les trottoirs certes ne sont pas adaptés pour les poussettes ou les handicapés, la priorité est à l’arbre.

L’arbre décide, l’ingénieur s’adapte pour ses canalisations, conduites, lignes aériennes.

L’arbre se développe sans obstacle bétonné, la voirie utilise des pavés souples pour ne pas gêner le développement des racines.

Priorité à la propreté, à la légalité, ou à la survie de l’espèce humaine et au refroidissement de la ville?

Clairement les habitants de Tbilissi ont choisis pour notre plus grand bonheur, confort de voyage et surtout d’anticipation sur le réchauffement. Nos services industriels et d’urbanisme devraient venir ici voir ce qui se passe et réviser leurs préjugés sur les espèces, les développements, les tailles, les compatibilités, les règles de tous poils observées à la lettre laissant passer entre les mailles, le principal: le réchauffement climatique. les rues sont arborisés, la ville est également enserrée dans des parcs, des collines fortement arborisées.

Oui les trottoirs sont de fait chaotiques. Mais les fondaisons sont là, du matin au soir. Et les feuillus perdent leurs feuilles en hiver laissant la lumière arriver. Les feuillus évitent également des accumulations de neige, il est vrai que l’on en a tellement ces dernières années…..

Diversité et densité des plantations

Le platane est roi dans les grandes artères, inégalé en vitesse de pousse et surface de recouvrement. Dans les rues plus étroites, pas d’alignement mono-espèces: 5-10 micocouliers, succèdent à 5-10 faux camphriers, eux-mêmes étant entre-coupés de cyprès ou simplement de lilas des Indes (Largestroemia) ou althéa en buisson de 3-4 mètres. La ville de briques et bois pour ses parties anciennes, béton et verre pour les quartiers récents, devient homogène avec une couverture de toute ses voiries. La diversité d’essences, de couleurs, de formes, de tailles, de volumes, de floraisons (Nous sommes en période d’althéa et d’acacias) assure un spectacle de verdure , un théâtre permanent.

Dans les quartiers en pente, la vigne est omni présente, dirigée à 5 mètres au-dessus de la route, couvrant d’une treille tous les accès résidentiels, une belle idée pour rendre sympathique nos quartiers de pavillons dortoirs.

Comment ces arbres restent-ils toujours verts en période de sècheresse?

Nous nous sommes longtemps posé la question depuis notre arrivée dans les Balkans et maintenant dans le Caucase où l’eau est présente au minimum dans tous les fonds de vallées.

Les services de voiries des grandes villes, passent régulièrement les surfaces à l’eau, le pavé est roi, l’eau pénètre dans le sol (contrairement à certaines villes suisses où l’on se plait à tout bétonner pour évacuer l’eau(* pour des exemples concrets, contactez Philippe). Dans les quartiers résidentiels, contrairement au pourtour méditerranéen où l’espace public est souvent confondu avec une déchetterie, ici les géorgiens ramassent leur et les ordures, entretiennent leur jardin, les arrosent, arrosent les arbres de leur rue. C’est une routine, la clope au bec, le chien d’une main, le tuyau d’arrosage de l’autre. Rien de précis, mais on mouille, on arrose, on asperge, pour laver, refroidir et arroser cette nature qui émerge des pavés qui laissent filter l’eau – vous l’avez maintenant compris. Nous sommes heureux de voir qu’à 3’000 kilomètres de la Suisse, dans un pays montagneux, sans grandes richesses économiques étalées, l’intelligence quotidienne au service de la collectivité permet de baisser de 10 degrés la température d’une ville, 23 degrés sous les arbres, 33 degrés en plein soleil.

L’exemple du jardin botanique de Tbilissi

Imaginez au milieu d’une ville de 20 km de long -10 km de large, une gorge de 100-1000 m de large, profonde de 100 à 300, une canopée plantée fin 19ème siècle qui serpente sur 100 hectares, cachée des regards des habitants, seuls les passagers aéronautiques la voient. La gorge est parcourue d’une petite rivière qui apporte la fraîcheur nécessaire à, nous dit le guide 4500 espèces de plantes.

Ce jardin ou plutôt ce parc est magnifique de profusion d’espèces et de sujets plantés il y a un siècle. Cependant, de jardin botanique, si les plantes sont là, le manque de signalétique nous fait passer à côté du sujet de la biodiversité. Certes nous voyons des individus magnifiques, mais peu mis en valeur, rien à voir avec l’approche didactique du jardin de Batoumi. Ici aussi, les espèces n’ont pas le même développement qu’au bord de mer. Nous sommes dans un climat continental à 450 m d’altitude, sec.

Cela reste un endroit magique, un parc de promenade entretenu et replanté, avec une grande densité, un lieu d’exception.

L’oligarque Bidzina Ivanishvili se s’y est pas trompé, en installant en bordure du parc sur les crêtes qui dominent la ville, sa modeste villa moderne pourvue d’une piste d’hélicoptère.

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