Pépé l’Ibizenko

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Une rencontre authentique dans l’île des tentations

26 avril-7 mai 2021, Ibiza – San Miguel de Balansat – Nord de l’Ile à 4km des côtes

Contexte paysager

Paysage agricole à 90%, jardiné sans être ‘’léché’’, constitué de petites collines dont les sommets sont boisés de pin couvrant une garrigue aride. Max 400m d’altitude, dominées par des sommets appelés ‘’Puig’’. Entre les collines, ‘étendent les cultures  sur de petites plaines de quelques dizaines d’hectares. Les champs situés au début des pentes des collines sont tous soutenus par des kilomètres de murets de pierre sèches en calcaire local en très bon état. On retrouve ces paysages de cultures en terrasses dans tous les pays escarpés. Quasi tout le Nord de ‘Ile est quadrillé par des constructions et habitations tous les 500 à 800 mètres, dans un paysage de bocage sec d’où ressortent les arbres caroubiers, pins, quelques chênes verts Quercus Ilex en émergent.

L’agriculture

Les ‘’ibizenko’’, habitants de l’île d’Ibiza, ont un grand respect pour les arbres qui sont présents dans tous les champs, pratiquant une agriculture proche de l’agroforesterie, bien avant que nos agronomes n’établissent cette dénomination. Les arbres cultivés sont majoritairement, les caroubiers, oliviers, abricotier, grenadier, pommier, poirier, pêchers, cerisiers, orangers, citronniers, néfliers, avocats. Hormis les céréales (avoine, seigle, légumineuses telles que lentilles et pois), les cultures sont toutes irriguées par des systèmes de goutte à goutte alimentés par des puits reliés aux nappes phréatiques.

Très peu d’animaux, pas de bovins, très peu de porcs, d’équidés, quelques moutons, l’agriculture semble orientée sur l’autoconsommation. La terre ne se vend pas, elle se transmet, souvent les ‘’paièses’’ propriétaires de ‘’finca’’ ont construit des habitations qu’ils louent à prix d’or aux touristes durant la belle saison (de mai à octobre). Les cultures ne sont fondamentalement pas ‘’bio’’, mais l’usage de pesticides et d’intrants reste faibles au regard des prix de ces produits d’importation.

 

PEPE – agriculteur/pêcheur

Joseph  dit ‘’Pepe’’, est une personnalité, une dynamique hors norme. Paysan d’abord, pêcheur ensuite, cuisinier, constructeur de mur et de finca impénitent, mais surtout ‘’jouisseur’’ de la vie. Polyglotte, grand voyageur, il aime communiquer et partager sa philosophie de vie qu’il s’est construite et dont il est très fier. Positif, joyeux, plein d’humour, sybarite, charnel, il distribue, en passant, quelques petits conseils qui peuvent égayer le quotidien. « « j’aime enlacer ma femme lorsqu’elle se brosse les dents, elle rit toujours de ne pas pouvoir me repousser ses mains étant occupées! ».

Toujours enjoué, debout à 5 heures, il arpente ses terres jusqu’à 20 heures, avec une pause-sieste de 4-5 heures, deux fincas (petite ferme traditionnelle) dont une de 25 hectares qu’il exploite seul en recourant à un/une aide partielle. Très grand travailleur (chaque jour sauf les jours de pluie) mais « il existe un jour demain et après-demain, nous continuerons ensuite ». Les mois de juin, juillet, aout, sont allégés consacrés à la pêche dans sa crique de Portitxol. Les bons repas, la convivialité, sont aussi importants. Il a choisi de ne pas avoir d’animaux pour se permettre des vacances de plusieurs semaines à l’étranger et des repos les week-end.

  • 56 ans, père de 2 enfants, divorcé, sa vie tourne autour de ses domaines qui constitue sa base vivrière. Producteur de fruits, de céréales, de vin, de légumes, Katerina, sa Maman de 74 ans reste toujours alerte dans ses potagers et poulaillers qui visent à nourrir la famille, les locataires des diverses habitations situées sur ses fincas. Sans oublier le restaurant local populaire (jusqu’à 300 couverts le week-end) qu’il a construit dans une finca, écoulant une partie de ses produits. Sa structure familiale recomposée ne lui permet plus ni de développer l’acquis ni d’assurer que le domaine perdurera après lui.

Pepe utilise ni intrants, ni pesticides ni engrais, par soucis d’économie, pas franchement intéressé par la notion du bio, mais plutôt dans une approche d’harmonie avec la nature. Pourquoi acheter des engrais alors que les foins et désherbages manuels servent de couvre sol et d’engrais autour des arbres, sachant qu’il n’a aucune contrainte de productivité.

Pourquoi ne pas produire plus ?

Les coûts de distribution et commercialisation sont disproportionnés par rapport aux volumes restreints des différentes productions. Les fruits vendus 1 euros le kilo aux intermédiaires sont proposés aux bobos et touristes de l’île à 4-5 euros le kilo sous le label ‘’Organics’’, la marge nette restant faible pour les producteurs. Aucun système de vente à la ferme ou de panier, ou via le canal digital n’existe.

La conscience des plantes médicinales n’est pas franchement présente, mais par contre celle de la maîtrise des fruitiers, des greffes, de la sélection des meilleures variétés semble être parfaitement maîtrisée. Les plantes aromatiques sont omniprésentes dans une approche culinaire essentiellement, qui génère de fait une approche préventive d’un régime alimentaire ultra-sain, approvisionnement local, autosuffisance, circuit-court, échanges de récoltes, personnes en santé de part un climat doux, une activité physique quotidienne et un stress réduit, dans un univers campagne sans véritables nuisance sonores ou chimiques.

Ce que nous avons aimé chez Pepe, c’est une joie de vie impressionnante, une planification de son temps ménageant clairement un espace pour cuisiner pour les amis, de rien faire le dimanche, se faire plaisir par des sorties en mer, rencontrer des amis et ‘’aimer, aimer, aimer’’ toujours une/ des (nous ne saurons jamais) femmes joyeuses et toniques.

Un embonpoint de bon aloi lié à ce tempérament de bon vivant lui permet de passer l’hiver sans tracas, les plantes médicinales à ce tarif là ont moins de place que dans le cerveau de nos habitants des villes spleeneux qui découvrent les alternatives préventives à la médecine d’urgence, via l’existence de plantes médicinales.

Il se soigne avec quelques huiles essentielles conseillées par des touristes tout comme sa pratique très régulière du yoga

Plantes médicinales utilisée: le thym pour assaisonner le poisson

La finca centre de la famille et des activités de Pepe

C’est une ferme, c’est une entreprise familiale, c’est un endroit de vie, de jour comme de nuit, de travail comme de loisirs, d’ailleurs il y a même construit un restaurant pour vendre à l’origine ses fruits et légumes, sans oublier sa pêche.

La famille de Pepe et son plus grand supporter , habitant la Finca, Manuel Ehrensperger

Pepe l’ouverture sur les autres

Nous rencontrons un vieil ami de Pepe : Juan. Retraité, il se passionne pour son île. Il a photographié les 1800 petites maisons de pêcheurs, et tient un blog recensant toutes ses connaissances sur l’ile : botanique, architectures, etc.

Pepe héberge sur ses fincas, plusieurs types de personnes; sa famille pour commencer, ses fils, sa Maman, son ex-épouse, des locataires à l’année, comme Manuel, frère de Cécile , fondateur d’une agence de Hiking, marche sportive assurant la visite hors des sentiers battus des plus beaux points de vues sauvages de l’île. manuel.ehrensperger@ibiza.hike.com

https://www.instagram.com/ibiza.hike.station/

Pépé, c’est la joie la générosité, le partage de ses productions d’un repas, écouter comprendre les histoires des autres , au fil du temps, il parle l’anglais, le français et un peu l’allemand.

Aller travailler aux champs avec Pepe

 

Dès notre première rencontre nous le sollicitons pour travailler avec lui. Sans refuser notre demande, il ne nous donne pas de rendez-vous et reste très évasif. Nous nous rendons utile spontanément, alors autour de la maison et remettons en état l’air de battage mangé par les herbes et jonchés de débris. Nous prenons soin de dégager toute sorte de matériel empêchant la mise en valeur d’une belle vieille vanneuse, séparatrice de grains, nous organisons un râtelier de stockage pour suspendre les tuyaux d’irrigation, entremêlés entre dans les herbes. Pepe venant de débroussailler les alentours de la finca, nous prenons le râteau et ramassons le tout. La grand-mère nous indique le feu sur lequel déverser. Ces herbes contiennent trop de graines de mauvaises herbes et ne se sont pas adaptées au paillage, selon t-elle.

Quelques jours plus tard, nous le rencontrons un soir en rentrant d’une randonnée à la découverte des plantes de l’île. Joyeux, il nous invite à déguster un bon repas en compagnie de son amie, trois poissons au menu dont un bar et un, un barracuda cuits à la vapeur, au gros sel, sur les pommes de terre de sa production, le tout accompagné de son vin qu’il nous conseille de ne pas boire. Cette année le vin est raté, vinaigré, la première fois de sa vie qu’il le rate ! Le repas est joyeux et animé. Pepe commence se livrer et à nous raconter sa passion des murs, de se terre, de ses arbres, de ses enfants, et des femmes. Mais toujours pas d’invitation à venir travailler avec lui. C’est deux jours avant de devoir se quitter qu’il nous convoque à 9h00 dans une de ses fincas. Un champs d’avocat, de grenadier, pommiers, cerisiers, poiriers, néfliers doit être entièrement fauché, le foin servant de paillage directement sous les fruitiers de la parcelle. un constat sans appel: il fait de plus en plus chaud et l’année passée, faute de pluie, il a perdu 100 amandiers. Nous nous attelons à la tâche suivant les instructions qu’il nous donne à nous et à son beau-frère, son ouvrier fidèle avec qui il entreprend les grands travaux. Nous commençons les foins le 7 mai et assurerons la première et dernière coupe de l’année!(Pas étonnant que les vaches aient disparues des champs ces dernières années.

La variété des herbes est impressionnante et indique une absence de pesticide et d’animaux de pâture. Munis d’une faucheuse, Pepe s’engouffre dans les allées de ses arbres. Nous ratissons et sommes étonnées de découvrir un sol rouge, nu.

Découvrant du millepertuis nous lui expliquons ses propriétés, lui décrivant la puissance de l’hypericine sur les âmes tristes, les enjeux pharmaceutiques, l’interdiction de récolte en France. Nous tentons de captiver son intérêt en lui expliquant comment fabriquer l’huile de massage relaxant. Il nous invite à revenir récolter la plante en compagnie de sa femme.

Pepe – les projets

L’hiver, les cultures se reposent, c’est l’époque dévolue à la construction, aux constructions, reconstructions de murs, murets, fincas pour loger toute sa famille, ses deux fils qui auront d’ici quelques années chacun leur maison pour leurs 18 ans!

Les murs de pierre sèche, c’est une des grandes passions de Pepe ; il maîtrise toute la chaîne de la valeur, de leur extraction dans ses parcelles, la sélection, le transport, la taille, le calibrage, les couleurs, les formes : murs de pierre disposées horizontalement, en oblique pour respecter une ancienne tradition, jusqu’à l’édification. Toutes ses parcelles sont emmurées.

Cette année, Pepe achève ‘’ son projet personnel’’, une bodega que nous avons visitées en toute dernière minute, le projet de sa vie, son grand plaisir secret. Le chantier sera achevé cet automne, c’est une maison de plein pied enterrée sous 1 mètre de sol, dont on ne distingue que la façade. Elle comprend un caveau destiné à la maturation de son vin, et une habitation de 3 pièces destinées à lui assurer sa pause quotidienne de 4-5 heures durant les heures chaudes. La ‘’bodega’’ est donc à température ambiante toute l’année, épargnée par les grosses chaleur, éclairée par des couloirs extérieurs encaissés limitant l’impact dz soleil sur les murs. Un concept qui évite toute dépense énergétique pour climatiser ou éclairer.

La bodega achevée, Pepe se lancera dans une aventure nouvelle pour lui, l’autonomie énergétique ; chauffe-eau solaire, panneaux photovoltaïques, mini éolienne. Il possède déjà un puit alimentant une citerne en hauteur qui assure une pression suffisante pour ses 25 hectares irrigués et la consommation d’environ 15 personnes.

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